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Pourquoi est-ce utile d’avoir plus d’émotions positives?

De nombreuses recherches dans le domaine de la psychologie positive ont montré que les émotions positives nous permetttent de mieux appréhender les problèmes et donc de mieux les résoudre. On sait maintenant que les personnes les plus  résiliantes sont celles qui arrivent à mieux se connecter à leurs émotions positives. Barbara Frederickson (University of North Carolina at Chapel Hill), que j’ai eu l’honneur d’entendre récemment à une conférence à Harvard Medical School, est probablement la scientifique qui a mené le plus de recherche dans ce domaine. En bref, son message est le suivant: nos émotions positives sont parmi nos meilleures ressources personnelles. Elles nous permettent d’être plus conscients de ce qui se passe, de prendre une perspective globale, d’augmenter notre mémoire des détails, d’appréhender les situations d’une manière plus contextuelle, d’être plus créatifs dans la résolution de problème, d’être plus résistants au stress, d’augmenter la confiance et même d’être meilleurs négociateurs. Les émotions positives sont donc essentielles dans notre vie professionnelle, particulièrement dans des métiers de stress (p.ex. médecins, dirigeants etc.), mais aussi  dans la vie privée (p.ex. santé physique). A souligner que les émotions négatives sont aussi importantes: leur fonction première est de nous protéger, dans certaines situations, ce qui peut se révéler vital. Selon les recherches, il faudrait arriver à un ratio d’émotions positives de 3:1.

Dans une démarche de formation du leadership, de développement personnel ou de gestion d’équipe, l’augmentation du ratio d’émotions positives est donc un objectif intéressant. C’est un aspect que j’inclus dans ma pratique, particulièrement dans la gestion d’équipe, et c’est impressionnant de voir l’impact immédiat sur le travail effectué et sur la satisfaction personnelle des collaborateurs. Envie d’essayer?

Réinventer une dynamique et accélerer la performance en partant de ce qui fonctionne

Notre manière d’approcher la gestion d’entreprise est encore très teintée d’une philosophie se basant sur la description des problèmes et l’étude de ses causes. Qui n’a pas assisté à une réunion de projet dans laquelle chaque membre passe en revue ses problèmes et difficultés, ce qui résulte, à la fin du tour de table, en une immense liste de points à résoudre, plombant de ce fait l’énergie du groupe et portant un coup fatal à sa capacité de réagir de manière créative ?

Je vous propose d’envisager une approche différente, qui va prendre racine dans la psychologie positive : l’identification des forces, que ce soit de personnes ou de groupes.

Petit rappel théorique très succinct

Un des prémisses de la psychologie positive est de comprendre ce qui fonctionne particulièrement bien chez les individus. En prenant le contrepied de la psychologie classique, qui se penche plutôt sur les faiblesses (maladies mentales), les psychologues positifs ont tenté d’élaborer un catalogue de ces forces: en quelque sorte, ils ont dressés un inventaire similaire au DSM IV qui est résumé sous forme de 24 traits de caractères spécifiques, intitulés « Forces de caractère » et regroupé dans un catalogue. On retrouve parmi ces forces l’humour, l’honnêteté, la prudence, le courage ou l’espoir. Pour plus de détails, consulter la bibliographie extensive du Prof. Martin Seligman ou le site www. viacharacter.org, vaste réservoir de ressources à ce sujet.

Retour à la vie de l’entreprise

En tablant sur les forces des membres de l’équipe et celles résultantes du groupe, il est possible de changer la dynamique pour accélérer la performance. Premier pas capital, valoriser ce qui fonctionne. Dans une réunion de projet, l’animatrice va d’abord demander à chacun d’identifier un point qui a particulièrement bien fonctionné. Ensuite, comprendre et identifier les éléments qui ont fait la réussite : par exemple, un membre qui mentionne l’excellente collaboration entre deux personnes soulignera la capacité d’écoute de cette dyade. L’étape suivante consiste à voir si l’élément sous-tendant la réussite peut être répliqué et / ou systématisé : une autre collaboratrice, pensant à une difficulté rencontrée, peut donc essayer de prendre l’écoute comme « outil » pour résoudre son problème.

Comme vous le comprendrez dans cet exemple, il ne s’agit pas de faire comme si les problèmes n’existaient pas. L’objectif est prendre une nouvelle stratégie pour avancer, approche qui valorise, libère les énergies positives, la créativité et réduit également le stress du groupe.

Faites-en profiter votre équipe !

Pour développer cette approche en amont avec votre équipe, prenez l’occasion d’une journée «  au vert ». En guise de préparation, chaque collaborateur fera l’inventaire de ses forces en faisant un rapide test sur le site www.viacharacter.org. Il est gratuit et disponible en plus de 12 langues. Les données récoltées servent de base à des nombreuses études scientifiques, utilisées notamment par le fonds national suisse. Dans une première partie de journée, chaque participant va pouvoir évoquer ses forces principales en petits groupes et les illustrer à l’aide d’exemples. Ensuite, vous pourrez travailler  la résolution d’objectifs prioritaires pour votre équipe, comme par exemple, augmenter la réactivité face aux demandes. De manière individuelle puis en groupe, vous pourrez utiliser les forces pour imaginer des solutions potentielles à cet objectif.

Contrairement à une approche classique, vous verrez vos collaborateurs d’abord surpris, curieux puis plus investis et créatifs. L’énergie du groupe et sa capacité de réaction s’en trouvera renforcée. Mon expérience prouve que c’est en général le début d’une nouvelle dynamique qui ne cessera de se déployer, dans les jours et semaines suivants la première expérience !

Emotions positives et impact sur la performance

Depuis une quinzaine d’années, des études scientifiques sont menées dans le domaine de la psychologie positive, notamment concernant l’utilité et l’impact des émotions positives. Barbara Frederickson par exemple étudie l’impact des émotions sur la physiologie de la personne: les émotions négatives, qui accélèrent l’activité cardiaque, permettent une réaction ciblée et rapide. Les émotions positives, par leur effet de régulation de l’activité cardiaque, engendrent une plus grande variété dans le type de réactions possibles. Les deux types d’émotions sont utiles: par exemple le danger, une émotion négative, accélère le rythme cardiaque et permet une réaction rapide et ciblée de défense. La joie ralentit l’activité cardiaque et ouvre un large éventail de réactions, et donc une créativité plus large. Faisons le pas d’en tirer les conséquences sur le lieu de travail. Il est intéressant de travailler sur le renforcement des émotions positives chez un collaborateur, afin d’une part, de ne pas sur-activer son système cardiaque (et donc de mener à des ennuis de santé) mais surtout, pour aider à développer l’agilité intellectuelle, la créativité et la capacité à nouer des relations sociales. En résumé, en travaillant à développer les émotions positives de ses collaborateurs, par exemple par le coaching individuel ou le coaching d’équipe, l’entreprise contribue à améliorer sa performance, au sens large du terme.

A retenir:

  • Le lien entre émotions et activité cardiovasculaire
  • L’éventail plus large de réaction lors d’émotions positives
  • Le coaching comme outil de gestion de la performance, par exemple en travaillant sur les émotions positives

Comment créer des équipes performantes?

Selon une étude parue récemment dans Harvard Business Review (avril 2012), menée par Alex Pentland (MIT), il est possible d’identifier et de mesurer les éléments qui font qu’une équipe est performante. Ce qui est intéressant dans cette étude, c’est que ce sont les interactions qui ont été analysées et non pas le contenu des échanges entre membres de l’équipe. Les 3 clés de cette performance sont: l’énergie de l’équipe, l’engagement des membres de l’équipe et l’exploration faites par ces membres. Sous énergie, on entend le nombre d’interactions entre les membres de l’équipe. On découvre que c’est le face-à-face qui a le plus haut potentiel d’énergie. Par engagement, on on comprend la distribution des échanges entre les membres de l’équipe: plus ceux-ci sont partagés entre tous les membres, plus l’équipe est forte. Enfin, par exploration, on inclut le nombre d’interactions des membres de l’équipe avec l’extérieur. Cette exploration permet par exemple d’accroître la créativité du groupe. Ces résultats permettent très concrêtement d’agir sur la dynamique d’un groupe. Ils confirment aussi la part essentielle des comportements dans la communciation. Ceux-ci permettent également de valider certaines techniques, comme celle développée par Nancy Kline (the Thinking Environement), qui insiste sur le comportement des éléments du groupe. Concrètement, elle montre que si on définit comme règle dans un groupe que chacun a droit à la parole, de manière égale et non-interrompue, et que chacun doit écouter l’autre avec attention (en regardant la personne), la dynamique du groupe en est renforcée et l’équipe est plus performance. Selon les termes de l’étude ci-dessus, ceci revient simplement à renforcer l’engagement.

Alors, quelles conclusions pour vous?

1. Dans la gestion d’une équipe, observer les acteurs et leurs interactions pour identifier les schémas de communication

2. Partager les résulats avec les membres de l’équipe et identifier conjointement, en explicitant les résulats, comment augmenter: l’engagement, l’énergie et l’exploration de chacun de membres

3. Pratiquer quelques réunions avec conscience de ces aspects

4. Effectuer une nouvelle évaluation, à partager à nouveau avec l’équipe

5. Continuer le processus d’amélioration