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Réinventer une dynamique et accélerer la performance en partant de ce qui fonctionne

Notre manière d’approcher la gestion d’entreprise est encore très teintée d’une philosophie se basant sur la description des problèmes et l’étude de ses causes. Qui n’a pas assisté à une réunion de projet dans laquelle chaque membre passe en revue ses problèmes et difficultés, ce qui résulte, à la fin du tour de table, en une immense liste de points à résoudre, plombant de ce fait l’énergie du groupe et portant un coup fatal à sa capacité de réagir de manière créative ?

Je vous propose d’envisager une approche différente, qui va prendre racine dans la psychologie positive : l’identification des forces, que ce soit de personnes ou de groupes.

Petit rappel théorique très succinct

Un des prémisses de la psychologie positive est de comprendre ce qui fonctionne particulièrement bien chez les individus. En prenant le contrepied de la psychologie classique, qui se penche plutôt sur les faiblesses (maladies mentales), les psychologues positifs ont tenté d’élaborer un catalogue de ces forces: en quelque sorte, ils ont dressés un inventaire similaire au DSM IV qui est résumé sous forme de 24 traits de caractères spécifiques, intitulés « Forces de caractère » et regroupé dans un catalogue. On retrouve parmi ces forces l’humour, l’honnêteté, la prudence, le courage ou l’espoir. Pour plus de détails, consulter la bibliographie extensive du Prof. Martin Seligman ou le site www. viacharacter.org, vaste réservoir de ressources à ce sujet.

Retour à la vie de l’entreprise

En tablant sur les forces des membres de l’équipe et celles résultantes du groupe, il est possible de changer la dynamique pour accélérer la performance. Premier pas capital, valoriser ce qui fonctionne. Dans une réunion de projet, l’animatrice va d’abord demander à chacun d’identifier un point qui a particulièrement bien fonctionné. Ensuite, comprendre et identifier les éléments qui ont fait la réussite : par exemple, un membre qui mentionne l’excellente collaboration entre deux personnes soulignera la capacité d’écoute de cette dyade. L’étape suivante consiste à voir si l’élément sous-tendant la réussite peut être répliqué et / ou systématisé : une autre collaboratrice, pensant à une difficulté rencontrée, peut donc essayer de prendre l’écoute comme « outil » pour résoudre son problème.

Comme vous le comprendrez dans cet exemple, il ne s’agit pas de faire comme si les problèmes n’existaient pas. L’objectif est prendre une nouvelle stratégie pour avancer, approche qui valorise, libère les énergies positives, la créativité et réduit également le stress du groupe.

Faites-en profiter votre équipe !

Pour développer cette approche en amont avec votre équipe, prenez l’occasion d’une journée «  au vert ». En guise de préparation, chaque collaborateur fera l’inventaire de ses forces en faisant un rapide test sur le site www.viacharacter.org. Il est gratuit et disponible en plus de 12 langues. Les données récoltées servent de base à des nombreuses études scientifiques, utilisées notamment par le fonds national suisse. Dans une première partie de journée, chaque participant va pouvoir évoquer ses forces principales en petits groupes et les illustrer à l’aide d’exemples. Ensuite, vous pourrez travailler  la résolution d’objectifs prioritaires pour votre équipe, comme par exemple, augmenter la réactivité face aux demandes. De manière individuelle puis en groupe, vous pourrez utiliser les forces pour imaginer des solutions potentielles à cet objectif.

Contrairement à une approche classique, vous verrez vos collaborateurs d’abord surpris, curieux puis plus investis et créatifs. L’énergie du groupe et sa capacité de réaction s’en trouvera renforcée. Mon expérience prouve que c’est en général le début d’une nouvelle dynamique qui ne cessera de se déployer, dans les jours et semaines suivants la première expérience !

Une lecture anthropologique du coaching

La marchandisation galopante de l’économie est une caractéristique de nos sociétés contemporaines. En outre, la quête de croissance, imparfaitement mesurée par le PIB, a poussé une majorité de gouvernements à développer des modèles économiques dont l’objectif est l’optimisation de la production, laissant de côté deux éléments essentiels: la préservation de notre capital environnemental et de notre capital social. Cette dynamique a comme corollaire l’émergence de mouvements très puissants autour de la question du sens de la vie, de la recherche de valeurs, à l’exemple du renforcement des mouvements religieux et de l’exacerbation des sentiments nationalistes.

Alors que pour certains, le coaching est érigé en instrument ultime de coercition dans cette folle poursuite de productivité, il peut aussi permettre à l’individu de se repositionner et d’identifier un objectif «durable» de vie, par une remobilisation individuelle.

Une valeur «humaine» ajoutée…

En entreprise, cette pression des résultats mène aussi à une déshumanisation grandissante. On parle beaucoup des difficultés des employés; il faut également relever la tâche éminemment difficile des managers qui, pour la grande majorité, portent d’énormes responsabilités, avec la pression s’y rapportant, en particulier ceux qu’on nomme les «middle managers». Le coaching apporte des réponses intéressantes pour transformer ce système et le rendre plus supportable à tous les niveaux. Par exemple, un manager qui apprend à accompagner ses employés, en leur donnant de la perspective, en leur laissant l’autonomie concernant la réalisation de leurs objectifs et en reconnaissant leur travail peut avoir un effet infiniment positif sur son propre bien-être et sur celui de ses employés. Grâce à l’accroissement de la recherche sur le coaching et sur ses effets positifs (evidence-based coaching), les entreprises l’intègrent aujourd’hui comme outil important de développement de leur capital humain.

Une réelle fonction sociale

Enfin, il est intéressant de constater une certaine variation géographique dans le développement du coaching. Dans les régions où celui-ci est particulièrement marqué (USA, Australie, Europe), on observe dans le même temps un fort affaiblissement des structures sociales traditionnelles. Les personnes de tout âge sont de plus en plus seules, les relations sociales s’étiolent, les rôles sociaux tels qu’incarnés par le pasteur ou le maître perdent de leur aura et les rituels disparaissent (à l’exception de ceux entretenus par la société de consommation). Autrefois, c’était la structure sociale – le milieu, les parents – qui déterminait l’objectif de vie, avec le corollaire d’un manque de liberté, en particulier pour les femmes. Aujourd’hui, cette liberté gagnée laisse un grand vide sur le marquage d’étapes de vie. Les rites et leur symbolique permettaient d’acter un certain nombre d’étapes et renforçaient le sentiment d’appartenance collective. Dans certaines sociétés, les anciens avaient un rôle nécessaire d’écoute, de questionnement, de mise en perspective. Or tant l’espace offert par le/a coach que la méthode d’intervention peuvent être mis en miroir avec ces éléments, ce qui peut en partie expliquer son développement rapide.

Quel avenir?

L’industrie du coaching est en plein essor, car son attractivité n’est pas un effet de mode mais bien un symptôme de changements radicaux dans nos sociétés, dans notre rapport au travail et dans notre vision de la vie. Les recherches théoriques et scientifiques soutenant la pratique, liées aux neurosciences, à la psychologie, à l’anthropologie, aux sciences de l’organisation, à la linguistique et à la philosophie sont autant des terrains de découvertes qui contribuent également à la croissance de cette discipline. Reste à s’assurer que sa pratique se concrétise toujours dans l’intérêt du client, dans le respect et la bienveillance.

Se donner le temps d’un « moment relation »

Alors que nous passons de plus en plus de temps devant l’ordinateur, isolés dans un open space, en lien avec le monde entier, ou sur un iPhone à toutes les heures du jour et de la nuit, nous oublions tout simplement l’importance d’une vraie relation avec l’autre.

Les éthologues ont depuis longtemps relevé la puissance du grooming chez les singes comme élément important de régulation sociale, par exemple en cas de conflit. Les anthropologues ont disserté pendant des décennies sur la l’importance du don comme ciment social. Les neuropsychologues ont observés l’impact positif du sourire sur les émotions de la personne qui sourit et de celle à qui le sourire est adressé. Les chercheurs en science de l’éducation ont démontré que la relation sociale est un facteur important de motivation intrinsèque.

Discuter avec un collègue, remercier la caissière, sourire au conducteur du bus, saluer une cliente, serrer une main, partager un mot d’humour, embrasser son ami, caresser un enfant, prendre la main d’une personne âgée, choisir un cadeau, bref tous ces petits riens sont plus puissants qu’il n’en parait. Alors quittez vos espaces virtuels et faites-vous du bien et du bien aux autres : donnez-vous le temps d’un « moment relation » par jour, vous vous en trouverez tout revigoré !