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Développer l’expérience client et gagner en compétitivité

L’expérience passe par les émotions

« L’expérience » client est devenue le centre de toutes les attentions. Et pour cause : alors que l’offre de produits et de services se décline à l’infini, le consommateur / client ne peut être convaincu et retenu que par une expérience d’achat ou d’utilisation qui sera unique. Parler d’expérience, c’est aussi provoquer des émotions qui resteront dans le souvenir. Evidemment, l’objectif pour une entreprise est de créer des émotions positives autour de ses produits et services, qui contribueront à renforcer la loyauté du consommateur et le rendre moins sensible au prix. En outre, une bonne expérience se raconte, se transmet et inévitablement attire d’autres clients.

L’expérience passe par tous les sens, c’est pourquoi plusieurs professions se concentrent sur cet aspect particulièrement important dans un contexte de globalisation. Les métiers de la communication (designers, marketers, publicistes), les informaticiens, les logisticiens et bien d’autres professionnels sont formés dans cette optique. Mais qu’en est-il des responsables d’entreprises, des managers ?

Et si l’expérience client était directement liée à l’expérience de l’employé ?

Le constat est simple : l’expérience d’un client passe par un contact humain. Que ce soit dans un supermarché, une assurance ou un hôpital, le client sera à un moment ou un autre en relation avec un employé de l’entreprise. Celui-ci a en main toutes les clés pour éveiller chez son client des émotions positives lors de ces interactions. Hors un employé qui n’est pas motivé, qui ne se sent pas reconnu ou qui ne comprend pas le sens de son travail, sera moins à même de communiquer sur ce plan et de partager des émotions positives. Il y a, bien au-delà d’un échange de produits ou de services, un partage sur le plan humain. A quoi sert-il de travailler sur les plus beaux design et les meilleurs produits si l’échange reste strictement sur un plan matériel ? Le client sera peut-être satisfait mais il ne reviendra probablement pas. La solution est donc évidente : pour développer l’expérience client, il faut d’abord se préoccuper de développer celle de l’employé.

Porter intentionnellement un regard interne

C’est revenir aux bases du management et d’abord renforcer la motivation des employés. Plusieurs aspects sont importants, tels que le partage de la vision et de valeurs, la communication, la reconnaissance (feedback), la responsabilisation, l’autonomie. C’est d’abord un changement profond au sein de l’entreprise qui conférera aux employés l’envie et la passion de partager et de construire des relations avec les clients, au niveau l’émotionnel. Nous sommes tous humains, c’est sur ce point qu’il faut travailler, le reste, c’est un peu comme mettre un emplâtre sur une jambe de bois. 

Des entreprises qui misent sur ce paradigme

Plusieurs entreprises de renom ont mis en place de véritables stratégies de développement humain pour atteindre cet objectif. Celles-ci s’appuient notamment sur le coaching pour générer et pérenniser les transformations nécessaires. On relève cette démarche chez certaines compagnies aériennes, dans l’hôtellerie de luxe et même dans l’industrie automobile. A titre d’exemple, Ford a développé un programme d’amélioration de l’expérience client, le CEM pour « Customer Expérience Mouvement », lancé en 2011 et soutenu par Helena Ford. Depuis, plus de 200 coaches, dont une septantaine en Europe, travaillent avec ce programme au sein du réseau  de distribution de Ford, avec un résultat économique probant : une forte augmentation de l’engagement des clients et une productivité accrue  chez les concessionnaires.

Cet article est également disponible en ligne sur le site de www.hrtoday.ch 

 

 

 

To successfully manage change, first understand it!

Les dirigeants actuels ont la lourde tâche de guider leur organisation à travers de multiples changements, exogènes et endogènes, tout en gérant le leur. A cette fin, il est crucial de savoir identifier les types de changement auxquels ils font face – techniques ou adaptifs– pour y apporter la bonne approche.

Cette capacité d’évaluation est par ailleurs décrite par Heifetz et Linsky[i], dans un article publié en 2002 dans la prestigieuse Harvard Business Review, comme un aspect critique de survie du dirigeant. Les auteurs qualifient de technique un changement qui reste confiné dans un système. En général, il y a des solutions plutôt faciles à identifier, qui peuvent être mise en œuvre, et qui résolvent le problème. On peut aussi parler de changement de premier ordre. Par exemple, pour réussir l’adoption de nouvelles règles de compliance dans une banque, on s’appuiera sur une formation aux employés, pour qu’ils puissent en prendre connaissance et les respecter dans leur activité quotidienne. Par opposition, dans les changements adaptifs (ou de second ordre), c‘est souvent le système et ses composantes qui sont remis en cause. Les solutions du problème ne sont pas clairement établies et il y a un haut degré de complexité.

Exemple d’une approche simple et puissante

La gestion de changements adaptifs demande une capacité à transformer son état d’esprit et à revoir sa manière d’aborder les problèmes. Les Prof. B. Keagan et L. Lahey [ii], de la Harvard School of Education, ont développés une méthode intéressante pour atteindre cet objectif.

En résumé, leur méthode se base sur un recadrage, dans lequel le focus d’attention passe du « problème » à « la personne ayant le problème ». Le résultat est une reformulation du problème qui met en lumière le besoin de changement au niveau comportemental. C’est également en ces termes que les solutions à mettre en œuvre sont décrites. Leur hypothèse de travail est la suivante : si le sujet n’arrive pas à changer, c’est parce qu’il est en proie à des croyances qui le « tiennent » et qui l’empêchent d’évoluer. La solution est donc de découvrir ces croyances, de les contempler, de les tester, jusqu’à pouvoir les ramollir suffisamment pour effectuer un réel changement de comportement.

Cette démarche, mise en œuvre en partenariat avec un coach par exemple, peut se révéler extraordinairement efficace et conduire à de pérennes et réelles transformations, que ce soit au niveau individuel ou dans le cadre d’une équipe.

Attention : Un changement dit technique peut en un cacher un autre…

Parfois, un changement initialement pris pour un changement technique peut se révéler de type adaptif. Prenons l’exemple suivant : un médecin hospitalier n’arrive pas à intégrer les nouveaux logiciels administratifs. Il a suivi plusieurs formations mais rien n’y fait. Son responsable RH lui propose l’aide d’un coach, sentant bien que le problème est ailleurs. Le coach et son client travaillent à découvrir ce qui se cache dans cette difficulté d’apprentissage : c’est une croyance profonde sur son auto-valorisation, qui exclut tout travail administratif. Fort de cette réalisation, le médecin va ensuite être capable de s’adapter, en remodelant sa croyance profonde. Avoir continué à lui payer des cours n’auraient que péjoré la situation – le médecin aurait été encore plus frustré et sa hiérarchie également.

[i]R. Heifetz & M. Linsky, « A survival guide for leaders », Harvard Business Review, June 2002.
[ii]Pour en savoir plus, consulter leur livre (R. Keagan and L. Lahey, Immunity to Change, Harvard Business Review Press, Boston, 2009) ou suivez leur MOOC, à disposition sur la plateforme EdX.